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J'ÉCRIS
J'écris parce que je ne sais pas peindre.
J'écris parce que je n'entends rien à la musique.
J'écris parce que je ne suis pas devenu chirurgien.
J'écris parce que je n'ai pas voulu devenir avocat.
J'écris parce que j'ai cessé d'être metteur en scène de théâtre.
J'écris parce que c'est une manière de faire du théâtre.
J'écris dans l'espoir de pouvoir revenir au théâtre.
J'écris parce que j'ai toujours écrit.
J'écris parce que j'étais bon en français à l'école.
J'écris parce que j'ai lu Joyce à dix-huit ans. J'écris parce que j'ai eu un choc en lisant le «nouveau roman».
J'écris pour prendre la parole.
J'écris parce qu'on a voulu me réduire au silence.
J'écris parce que j'aime écrire.
J'écris pour tenter d'écrire mieux ce que j'écris.
J'écris parce que j'ai appris à être seul.
J'écris parce que j'apprécie à présent l'effort solitaire.
J'écris parce que c'est la meilleure façon de TOUT dire.
J'écris parce que j'aime corriger ce que j'écris.
J'écris parce que je ne connais rien de plus passionnant.
J'écris parce que je pense que l'écriture est un mythe.
J'écris bien que l'écriture soit inutile comme le reste.
J'écris avec un Bic noir, sur du papier quadrillé.
J'écris ainsi parce qu'écrire ne vaut pas plus.
J'écris parce que j'aime lire.
J'écris pour être lu.
J'écris en regrettant de ne pas être mieux lu.
J'écris sans souci des lecteurs, mais en râlant d'en avoir si peu.
J'écris bien que les gens lisent de moins en moins.
J'écris bien qu'il y ait 100.000 fois trop de livres.
J'écris en mettant le meilleur de moi-même dans mes livres.
J'écris pour écrire.
J'écris pour tout dire.
J'écris par besoin.
J'écris par désir, par plaisir et par nécessité.
J'écris parce que l'écriture crée l'écriture.
J'écris parce qu'il y a tant de choses à dire.
J'écris pour résister à la connerie.
J'écris en sachant que cela ne sert à rien.
J'écris pour laisser quelque chose derrière moi.
J'écris parce que je HAIS le mépris.
J'écris parce que je crois qu'écrire est un art.
J'écris parce que j'ai longtemps rêvé devenir écrivain.
J'écris parce que c'est normal.
J'écris comme on respire
J'écris parce que ça ne fait de mal à personne.
J'écris même si tout le monde s'en fout!
J'écris parce que je suis venu vivre à Paris pour écrire.
J'écris parce que c'est ma vie.
J'écris parce que je crois que le monde existe pour donner naissance à un livre comme on dit.
J'écris parce que c'est le mode d`expression le plus économe.
J'écris par mimétisme voilé envers les écrivains que j'admire.
J'écris parce que j'admire Proust, Céline, Thomas Bernhard, Musil, Lowry, Joyce, Michaux, Molière, Calvino, Perec.
J'écris parce que Claude Simon m'encourage.
J'écris en espérant que mes enfants me lisent un jour.
J'écris pour emmerder les révisionnistes qui trafiquent l'histoire de la littérature belge depuis vingt ans.
J'écris pour avoir raison de mon histoire.
J'écris parce que «tout comprendre, c'est ne rien pardonner».
J'écris parce que j'aime les mots.
J'écris parce que le langage me fascine.
J'écris pour inventer ma propre langue.
J'écris parce que je ne crois pas ce qu'on me dit.
J'écris parce que c'est la plus belle façon de tuer le temps.
J'écris pour ne pas communiquer.
J'écris parce que j'ai appris peu à peu, tout seul, à écrire.
J'écris pour faire des livres.
J'écris chez moi.
J'écris dans ma maison.
J'écris en vivant normalement, sans avoir l'air d'un écrivain.
J'écris pour ranger les livres que j'écris dans ma bibliothèque.
J'écris sans que jamais un seul de mes «amis» n'ait dit quelque chose d'intelligent, ou de sensible, sur l'un de mes livres.
J'écris parce que Pavese a écrit «je n'écrirai plus».
J'écris parce que tout le monde écrit trop.
J'écris parce que pendant longtemps je n'ai pas écrit.
J'écris parce que très longtemps je n'arrivais pas à écrire.
J'écris pour ne pas employer les mots de tout le monde.
J'écris pour faire parler le silence.
J'écris pour remplir la page.
J'écris parce que le verbe n'est pas cher.
J'écris donc parce que ça ne coûte (presque) rien.
J'écris parce que personne ne le fera à ma place.
J'écris malgré ma mauvaise écriture.
J'écris bien que ma main déforme les lettres alors que celles-ci forment en principe l'homme de lettres.
J'écris ici.
J'écris assis.
J'écris assez.
J'écris parce que la fonction du langage est la fiction.
J'écris pour voir ce que c'est.
J'écris pour ne plus y penser.
J'écris par peur du vide.
J'écris parce que c'est en écrivant qu'on sait ce qu'est écrire.
J'écris non pas pour me dire mais pour m'exprimer.
J'écris moins pour m'exprimer que pour me taire.
J'écris non pour me taire mais pour parler.
J'écris parce que je crois à la parole.
J'écris parce que les paroles restent plus qu'elles ne volent.
J'écris parce que les mots ne racontent pas d'histoire.
Copyright © Patrick Roegiers, 2008
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